Des embryons triés pour vivre sans cancerEn France, depuis dix ans, six bébés sont nés indemnes d’un risque de tumeur familiale après un « tri » réalisé en laboratoire. Une pratique médicale jusqu’ici confidentielle.
Il y a un mois naissait, à Londres, le premier bébé indemne du gène du cancer du sein, grâce à l’intervention de la science. Cette petite fille anglaise va pouvoir vivre sans le spectre qui terrorise toutes les femmes de sa famille depuis des générations. Issue d’un embryon sélectionné en laboratoire, elle est née sans le gène qui a prédisposé son arrière-grand-mère, sa grand-mère et sa tante paternelle au cancer du sein.
Une hérédité fatale que ses parents ont voulu briser en demandant que, dès sa conception, leur bébé ne soit pas porteur de la version mutée du gène BRCA1, une particularité génétique qui augmente de 50 % à 80 % le risque d’un cancer du sein particulièrement agressif.
Cette incroyable histoire anglaise aurait très bien pu se dérouler en France aussi… Ce genre de diagnostic préimplantatoire (DPI) visant à sélectionner des embryons exempts de facteurs de risque génétique de cancer est également autorisé dans notre pays, mais sous certaines conditions. Selon le bilan d’application de la loi de bioéthique qui encadre ces procédures, 22 sélections de ce type associées à un risque de cancer ont été réalisées en France entre janvier 2000 et juin 2007 et ont conduit à la naissance de 6 enfants indemnes de formes héréditaires rares de cancer ou de maladie associée (polypose adénomateuse familiale, maladie de von Hippel-Lindau ou encore sclérose tubéreuse de Bourneville).
« Des cas extrêmement rares »
On savait cette pratique couramment utilisée dans les cas de maladies génétiques, mucoviscidose, myopathie, mais moins pour les cancers familiaux. La loi de bioéthique, qui est en cours de révision actuellement, interdit en effet les DPI pour « les formes héréditaires de cancer à évolution tardive » et les réserve aux couples ayant « une forte probabilité de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie génétique d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic ». Mais le législateur y a prévu une exception pour de « rares situations familiales où les tumeurs sont particulièrement évolutives et les décès particulièrement nombreux et précoces ».
« Ce sont des cas extrêmement rares, tempère Emmanuelle Prada-Bordenave, la directrice de l’Agence de la biomédecine, des contextes familiaux terribles où les grands-mères, les soeurs, les tantes, mais aussi les oncles (car dans ces familles-là, les hommes sont aussi touchés par le cancer du sein) sont marqués par la récurrence de cette maladie qui se traduit par des décès qui surviennent à un âge très jeune. »
C’est à un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (CPDPN), composé d’experts, généticiens, pédiatres, gynécologues… que revient de juger si la maladie est grave et familiale avec des tumeurs fulgurantes et des décès particulièrement nombreux et précoces. Ces six dernières années, une seule demande a concerné une prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire il s’agissait d’un couple dont l’homme était porteur d’une mutation BRCA1 , mais elle n’a pas été retenue pour « insuffisance de gravité ».
« Une procédure très lourde »
Toutefois, pour la directrice de l’Agence de la biomédecine, « il n’est pas question d’élargir les dispositions législatives actuelles. Ce n’est pas une mesure de convenance qui permettrait de se programmer un bébé comme on veut ! » Le professeur Dominique Stoppa-Lyonnet, chef du service de génétique à l’Institut Curie-université Paris-Descartes et membre du Comité national d’éthique, enfonce le clou : « En aucun cas, nous n’encourageons le DPI dans les cancers à évolution tardive, rappelons que le DPI est une procédure très lourde et que, dans 80 % des cas, il y a un échec derrière, ainsi qu’un retentissement psychologique sur le couple. »
Vous pouvez vous informer et réagir sur le site
www.etatsgenerauxdelabioethique.fr, lancé ce matin par le ministère de la Santé pour permettre à chaque citoyen de participer aux états généraux de la bioéthique.
Je ne sais pas ce que vous en pensez mais pour ma part si c'est avec l'intention de guérir le cancer comme une vulgaire maladie, sans se prendre pour Dieu, j'en serais ravie !